Carte postale d’à Yeur

Là-bas… au milieu de Nulle Part, si loin que personne n’a jamais pu s’y rendre et revenir indemne…

– Non, ça ne va pas du tout !

Quichottine soupira, son ami avait raison, ça  n’allait pas, pas du tout !

Le Lutin bleu, assis en tailleur sous la lampe…

– Ah oui, ce serait bien d’en parler.

– De quoi ?

– Ben… de la Lampe ! Il n’y en a pas cinquante ici.

Le Lutin bleu haussa un sourcil… un seul.

(Pas deux, ça serait bien trop grave, et, après tout, ce n’était qu’une broutille de plus à ajouter dans le pense-bête où il notait, jour après jour, les petits riens de Quichottine.)

– Tu n’as vraiment rien d’autre à dire ? Une lampe, ce n’est pas très intéressant.

– Sauf s’il s’agit de celle d’Aladin… tu sais ?

Le Lutin bleu haussa les épaules.

(Il ne pouvait pas soupirer, seule la Bibliothécaire savait le faire élégamment.)

– Aladin, Les Mille et une Nuits… Shéhérazade… un Sultan qui souffrait d’insomnie et avait décidé qu’aucune femme ne méritait sa confiance… Oui, je sais !

Quichottine se recroquevillait dans son fauteuil, devant l’âtre où plus personne n’allumait de feu. ON disait que c’était mal d’y entasser des bûches, de les voir s’embraser, de regarder les flammes danser, les braises s’amonceler et rougeoyer avant de s’éteindre doucement. Ce n’était pas écologique…

Le Lutin rassembla les pans de sa grande houppelande, s’envola presque jusqu’au sol où il se campa, fièrement, si petit mais si grand… un géant.

Il toisait son amie d’un air mi-sévère, mi-amusé.

– Tu devais nous parler de temps et de vent, non ?

– Tu crois ?

– De vent, oui… de tempête ? Je ne sais pas. Tu nous as plantés là comme si rien d’autre ne comptait que de rêvasser comme lorsque tu avais quinze ans !

– Ah… Je ne rêvasse pas… je ne songe même pas. Je réfléchis !

– À d’autres ! Tu ne dis plus rien, tu n’écris même plus, tu es là, bras ballants, mains vides, esprit à Yeur de plus en plus souvent ! Tu crois vraiment que tu vas t’en sortir comme ça ?

– Je ne sais pas, mais il faudra bien que tout s’arrête, que je sache à quelle branche je peux m’accrocher pour ne pas sombrer. Il doit bien y en avoir une. Les arbres n’ont pas encore tous disparus.

– Et voilà…

Le Lutin bleu hochait la tête, une moue désappointée envahissait un visage où les rides se creusaient de plus en plus… Plus de mille ans… près de deux mille, en fait ! Il y avait de quoi s’énerver devant un chagrin si peu justifié.

– Il y a pire, reprends seulement le fil de tes pensées, celles qui te libéraient des nuages, de la pluie, qui la rendaient si belle car elle était un souvenir heureux de chemin sous les arbres, de promenade main dans la main, de baisers insouciants.

La terre sentait si bon dans les sous-bois ! Le vent ne hurlait pas, il chantait en caressant les ramures-cordes d’une harpe magique… c’était beau.

– Tu aurais dû l’écrire dans tes cartes postales… celles que tu n’as pas envoyées, celle que tu as fait transmettre en utilisant les facilités de La Poste. Tu aurais dû continuer à chercher celles qui te correspondaient dans les carteries… Tu aurais dû ne pas avoir honte de tes pattes de mouche, de tes mains qui tremblent de plus en plus. Tu aurais dû te faire confiance au lieu de tant hésiter !

– J’aurais dû… murmura Quichottine, j’aurais dû.

Si vous aviez été sur place, vous auriez vu le Lutin bleu grandir à mesure que la Dame au grand cahier rapetissait. Ils échangeaient leurs personnages, chacun espérant que l’autre saurait comment lui redonner la vie qu’ils perdaient.

Quichottine se leva, péniblement. Où était passée l’énergie qu’elle avait su déployer précédemment ? Mille ans… non deux mille. C’était son âge désormais, mais elle n’avait pas de baguette magique, pas de souhait à exhausser. Juste une vieille houppelande à rapiécer.

50 commentaires à propos de “Carte postale d’à Yeur”

  1. Que votre journée soit douce… Prenez bien soin de vous.
    Merci d’être là.

  2. C’était un jour de grande fatigue. Un jour gris comme les nuages qui l’accompagnaient. C’était un jour où l’on cherchait dans le fouillis de la vie, une petite plume blanche pour effacer les grands soucis. Mais c’était aussi un jour à partager car à plusieurs la charge se fait bien plus légère. Légère comme une petite plume blanche.

  3. En panne d’inspiration, ma quichottine ???
    Je sors de ma pause, ce matin, avant d’aller encore passer la journée à faire des examens pour venir te remercier de ta gentillesse 😉
    Et te faire de gros bisoux doux, mon amie ♥

  4. ..pas la forme? elle se repose un peu et va bientôt revenir, laisse – lui le temps..
    Gros bisous du jour
    Mireille du Sablon

  5. Voilà une page bien triste, je t’envoie plein de bisous de réconfort
    Douce journée Quichottine, prends soin de toi

  6. Un peu de mélancolie … mais le Lutin est là, avec ses mots qui me font sourire, et toi aussi j’espère, et qui t’encouragent à aller de l’avant.
    Il faut de ces pauses, qui ne sont pas aussi  » vides  » qu’on le croit …
    Bisous, Quichottine, avec des pensées affectueuses.

  7. Coucou Quichottine,
    Besoin de repos, de te ressourcer, mais cela arrive à tous non ?
    Même là, tu parviens à nous offrir de très jolis écris, quelque en soit le ton.
    Bisous et bonne journée

  8. Je lis aujourd’hui ta carte postale d’à Yeur et que vois je dans ma boite aux lettres une magnifique carte de Cergy . Un grand merci Quichottine pour penser à nous dans des moments que je devine difficiles pour toi . Le Lutin bleu heureusement est là pour te tirer de cette mélancolie qui t’envahit , j’ai lu avec beaucoup de plaisir les articles concernés par tes liens , j’aimerais pouvoir juste demander au génie de la lampe de souffler sur ces gros nuages qui envahissent ton ciel .
    Big bisous Quichottine

  9. Il est des jours ainsi…faute à la LUNE d’août sans aucun doute je sens tant de personne à Yeur en ce moment qui patiente en attendant un meilleur vent qui chasserait les gros nuages…
    Je vais chercher un carte Quichottine , il doit bien en avoir une dans une boite de souvenirs !
    gros bisous

  10. Besoin d’une baguette magique…tu sais on en a tous besoin un jour ou l’autre et après tout ce que vous avez traversé c’est bien normal de passer par un gros coup de blues. Malgré sa tristesse j’ai aimé ton texte et je trouve Lutin bleu formidable comme toujours il trouve les mots justes pour te dire que nous sommes bien là pour toi et qu’on ne t’oublie pas. Je t’embrasse

  11. Eh oui ma Quichottine, nous n’avons pas de baguette magique et le temps, celui qui coule au sablier et celui qui fait la pluie et le soleil, nous éprouve redoutablement. Je comprends que cette fin d’été te rende nostalgique. C’est la période difficile où le temps retrouve une place qui fait un grand vide.
    Je pense fort à toi et t’embrasse.

  12. C’est peut-être le temps qui nous est donné pour se ressourcer après la tempête. Pas facile à gérer mais nécessaire…
    Fais du feu dans ta cheminée sans culpabilité, s’il n’y avait que cela qui pollue, la planète se porterait très bien;)

  13. Coucou douce Quichottine, un billet plein de mélancolie, voire de tristesse mais toujours aussi bien écrit. Je vais demander à Aladin de faire briller sa lampe pour toi..
    Je t’embrasse bien fort et pense bien à toi.
    chatou

  14. il y a des jours ou la mélancolique est la et c’est bien normale avec toutes ces épreuves ma Quichottine.. Prend bien soin de toi , je t’embrasse très fort..

  15. Pas l’air d’avoir la forme du tout Quichottine mince alors c’est l’effet de …mais de quoi en fait. Si ce n’est de tout ces tracas, pour ne pas dire pire!
    J’espère que demain ira mieux…Bisous bisous

  16. La page blanche, la hantise de tout écrivain…
    Le Lutin Bleu a raison de te bousculer un peu, regarde le grandir pendant que toi tu rapetisses.
    Yeur est un beau pays ma grande, écoutes les oiseaux, il viennent t’apporter des messages
    Tu n’est pas la seule, a te tourner vers Yeur. Et puis, nous sommes là, nous tous, à nous accrocher à tes rêves. Oui, tu nous transportes, tu nous fais rêver…
    La page blanche ! C’est pas grave ! Ça arrive à tout un chacun. Ta plume magique va bientôt se réveiller et tu vas encore râler parce qu’elle ne voudra plus s’arrêter….
    Je t’embrasse très fort ma Douce Amie

  17. Mélancolie, tristesse, momnt ou rien ne va…Un billet qui m’interpelle, je pense être comme cela ces temps ci..Quelques choses ne tournent pas ronds.

    Bisous

    EvaJoe

  18. Je vois Yeur comme une ville de cure, où l’on va « pour se refaire une santé », poser ses bagages de doutes, de peines, se poser et se reposer. Les curistes viennent de partout : de Rêve, d’Utopie, mais principalement de Vraie Vie. Une information me manque toutefois : comment se nomment les autochtones ? Ne me réponds pas « les Voyeurs » !

  19. Chère amie, le lutin bleu a besoin d’une aide, un petit chat doré ou une fée galipette. Les jours ne sont pas toujours gais mais lutin bleu te donne tout son cœur rien que pour toi. Petit coucou d’Alsace. Bises

  20. Laisser le temps au temps de faire son œuvre, sans penser que tout est anormal… Le temps fera ce qu’il faudra quand son temps sera venu… Patience, il ne s’agit pas de rapiécer mais de tourner les pages de sa vie, certaines se tournent plus lentement que d’autres… Patience sans désespérance, quand la pause est nécessaire, il faut lui laisser le temps de se poser…
    Je t’embrasse

  21. Tu as ton soutien, ta petite voix intérieure, ce lutin qui est tjs là pour toi. Lui aussi, il a ses moments de vide, mais il pense à la vie difficile certes mais combien précieuse et il repart. Il t’apporte plein de bises de ma part. VITA

  22. ça n’a pas l’air d’aller fort, ma chère Quichottine. Rien d’étonnant après toutes tes épreuves. Il faut laisser le temps au temps comme on dit, mais le moment présent n’est pas facile à vivre
    Je t’embrasse bien fort

  23. Salut,
    On n’a pas reçu de cartes postales cette année?
    On a un temps agréable.
    Plus de pluie et un peu de vent.
    Il ne faut pas se mettre à poil pour autant, MDR
    Bonne journée

  24. Merci beaucoup pour ta carte Quichottine qui me fais voyager malgré ce que tu pense car je ne connais absolument pas cette région. C’est très gentil. Bisous bisous en espérant que le moral remonte?

  25. Te voilà bien mélancolique ! Il est des jours comme ça.
    je souhaite que, petit-à-petit, plus d’allant te revienne.
    Je t’embrasse bien fort.

  26. Oui, certains jours on a 2000 ans . Et « le sac à dos » qu’on porte est comme chargé de pierres .
    Je t’embrasse bien fort Quichottine . Avec plein d’amitié.

  27. Bonjour Quichottine. Il y a des jours comme ça, où l’on se sent complètement démotivé… Et ça passe. Bonne journée et bisous

  28. Enormément d’émotion à la lecture de ton texte
    On ne peut que « ressentir » ce dialogue intimiste et puissant au creux du coeur,
    Merci pour ce partage qui fait briller des perles dans les yeux et merci pour tes cartes, reçues avec beaucoup de bonheur et d’émotion, à nouveau!
    Gros bisous de réconfort et amitiés en farandole de couleurs…
    Cendrine

  29. Salut,

    Tiotte ne va pas bien , alors pas de foire à Lille .

    On a acheté des moules de la baie du Mont Saint Michel à Intermarché pour moins de 4€ le kg alors on va se régaler.

    Bon week-end

  30. Merci cher lutin de veiller sur notre Quichottine ! il y a des moments où la barque prend l’eau mais quand un petit lutin écope avec énergie, un avenir plus souriant n’est pas loin.
    Bisous Quichottine.

  31. Je passe doucement, je m’assois un instant pour t’apporter quelques mots d’amitié que l’on partagerait comme une friandise autour d’un bon goûter !
    Je t’embrasse Quichottine

  32. Je viens de lire ton billet avec une grande émotion Quichottine.
    Je me suis assise quelques minutes dans ta bibliothèque, j’ai croisé le lutin bleu qui attend avec impatience les nouvelles petites histoires que tu sais si bien nous raconter.
    Je te fais une grosse bise
    Amitiés

  33. Il y a des périodes difficiles où l’on se sent écrasé par ce que le destin nous réserve…
    mais ne te décourage pas, chère quichottine, et remercie ton lutin !
    Moi, mon mari est à l’hôpital et je ne suis pas toujours capable de voir les rayons de soleil qui traversent le ciel…Gardons espoir !

  34. La fin de l’été, l’approche de l’automne, les jours qui raccourcissent , je crois que tout cela n’est pas fait pour donner de l’énergie , ni pour remonter le moral …
    Le changement de saison n’est jamais facile … Je te sens nostalgique et déprimée… Allons, nous sommes là pour toi … Courage;il y aura des jours meilleurs . Je t’embrasse

  35. Un petit coucou de septembre en espérant que le mois d’août a été très vivifiant pour toi je te fais de gros bisous merci pour ton com en mon absence

  36. Un billet tristounet et bien mélancolique…
    Pas toujours facile de garder le moral…
    De la nostalgie ces jours-ci j’en ai aussi…
    Le temps file si vite…
    Bisous de réconfort dame Quichottine

  37. Voila, par le biais de cette douce et poétique missive , une saison qui débute bien , Quichottine !

  38. Je me sens aussi, avec le temps et les jours qui déclinent, un peu mélancolique mais je sais que c’est normal. Merci pour cette histoire. Bonne fin de journée. Bises.