D’un jour à l’autre, d’un mois à l’autre, d’une année à l’autre… les mots s’alignaient sous des doigts impatients.
Voyons, comment avait-il intitulé son dernier livre ?
D’ailleurs, était-ce vraiment le dernier ?
Elle ne savait pas, lui aurait pu le lui dire, mais il avait franchi la dernière porte après un ultime adieu.
La dernière porte… Ah oui !
« D’une porte à l’autre« , c’était le titre !
Elle aurait aimé l’appeler Charles, mais elle l’avait placé sur un piédestal, presque aussi haut que celui qu’elle avait érigé pour le grand Jacques dans le panthéon de ses artistes favoris.
Monsieur Aznavour, bien sûr… « Monsieur Aznavour« , titre du film dont elle avait acheté le DVD, juste après en avoir vu un extrait dans l’hommage que la Télévision lui avait consacré.
Il y avait si longtemps que ses chansons, comme celles de Brel, parsemaient sa vie de moments…
Elle hésita, longtemps. Comment qualifier sans mentir les moments rythmés par des chansons, de simples chansons, des mots, des voix, des gestes parfois, des artistes pas forcément beaux, dont elle n’avait jamais été amoureuse, jamais ?
Les années avaient passé, la dernière était encore pleine de trop… de « TROP ».
Trop de silences, trop de soupirs, trop de larmes cachées, trop de joies bien trop brèves. La vie, bien sûr, celle dont on lui avait affirmé un jour que c’était « quelque chose de merveilleux« .
Si elle l’avait pu, elle aurait composé toute une symphonie, sur une portée dont elle n’avait pas la clé. Une symphonie, ou seulement l’une de ces chansons qui vous emportent à Yeur.
Mais son piano restait muet, désespérément, comme si le moindre bémol l’avait attendu, caché, tapi sous une touche blanche afin qu’elle ne pût se méfier, s’y préparer.
Pendant toute une année, la vie, le quotidien, l’avait empêchée de rêver.
Quichottine, c’était un rêve inassouvi, l’inaccessible rêve du Don Quichotte émacié que campait Jacques Brel sur des planches, un soir, à Paris.
Quichottine, c’était une parenthèse dans une vie qui lui montrait, jour après jour, que ce n’était pas toujours aussi merveilleux qu’on le lui avait promis.
Quichottine, c’était un pseudonyme qui prêtait à sourire, parfois à rire, à se moquer.
Quichottine, c’était l’écrivaillon de remplacement, celle qui avait ouvert une simple porte sur le monde, un monde ou chacun pouvait s’inventer une histoire, ou tous pouvaient se croire immortels, un peu, académiciens.
Elle avait croisé des êtres merveilleux, généreux, elle s’était dit qu’à défaut de réaliser le sien, elle pourrait apporter un peu de bonheur, de rêve, à ceux qui en avaient le plus besoin.
Mais était-ce suffisant ?
Je me suis interrogée, une année durant, jour et nuit, sous le soleil et sous la pluie. J’avais des tonnes de questions, et si peu de réponses…
Alors, bien sûr, je vais revenir, peut-être pas demain, car mes petits-enfants vont remplir mon logis de leurs rires, de leurs cris, de leurs soucis qui deviennent peu à peu les miens. Mais je serai là, tout bientôt, comme autrefois, dans les allées d’une bibliothèque un peu poussiéreuse, mais où un petit lutin bleu s’est trop longtemps demandé si sa vie ne tenait plus qu’à un fil, si ténu, si fragile.
Je vous parlerai de ces livres, des images, qui ont ponctué mon silence.
Et puis, comme l’avait chanté mon jumeau, il y a trop longtemps, qui sait ?
« Nous nous reverrons un jour ou l’autre… si Dieu le veut.«
© Quichottine, 5 août 2025
bien joli texte qui laisse plein d’interrogations , du temps pour réfléchir , relire
Bonjour Quichottine, la vie nous guide le plus souvent, on aimerait faire ceci ou cela, être ici…. et puis et puis, ce qui ne veut pas dire vie vide de sens…. d’une porte à l’autre, eh oui monsieur Charles…. au plaisir, bises jill
oui, les années passent, les désillusions, les décès des proches, les maladies invalidantes, les joies, les peines et la vie qui est là et qui a encore tellement à offrir même si nos capacités ne peuvent pas toujours aller au bout de nos désirs. je pense si souvent à toi, à ce que tu as nous apporté, cet élan, ces envies qui nous rendaient tellement pleins d’espoir et de vaillance. J’espère oui que tu vas revenir nous éveiller un peu de notre trop long sommeil d’hiver. Amitiés
un billet bienvenu nous donnant de tes nouvelles
oui nous t’attendons avec impatience
je suis la mamie des anthologies-ephemeres.fr/le-mariage-les-auteurs
il y a 10 ans !
JAK qui a vieilli dans son corps mais toujours fanfan
90 ans mais toujours d’attaque,
Je t’attends pour de nouveaux échanges
Amitiés
https://jakepistolaire.over-blog.com/
Chère Quichottine, il y a tant de mots agglutinés sur le seuil de la grande tour de ta bibliothèque, tant de pensées pour toi qui tournoient jusqu’à la grande fenêtre et se cognent aux carreaux, mais ni porte ni battants ne s’ouvrent, le lutin bleu n’a pas encore reçu le signal pour allumer les chandeliers et redonner du gonflant aux coussins… Aujourd’hui, il y a comme un frémissement entre les lignes d’une mélodie… « Ouvre-moi la porte, toi qui a la clé… »
Bonjour Quichottine alors nous t’attendons bisous bonne journée MTH
Quichottine est un joli pseudonyme rempli de poésie et qui ne prête oas à rire loin s’en faut. Elle me manque sur les pages virtuelles des blogs et j’espère la retrouver bientôt
et très bonne soirée ….superbe de te lire
Alors je t’attends
J’ai senti un petit courant d’air, une porte doit être grande ouverte .
Coucou. Heureuse de ton prochain retour. Bisous
Il y avait une chanson : Avec le temps… »et le temps est parsemé de rencontres et de petits plaisirs comme celui d’une bonne nouvelle celle de ton retour Quichottine !
Il est des pages qu’on n’oublie pas.
A bientôt donc
Je t’embrasse
Bonsoir Quichottine . Quel bonheur de vous retrouver ! Savoir que « ta roulotte croisera encore la nôtre » est une bonne nouvelle . A tout bientôt . Je vous embrasse. Zoé
La vie va et vient ! Du bleu, du blanc, du gris. Merci pour tes nouvelles. Bons moments avec tes petits enfants. Bises
Quel surprise agréable de voir dans ma boîte mail ton avis de publication et le plaisir ensuite de te lire. J’aime aussi beaucoup Aznavour mais je me demandais si tu allais nous parler de toi et tu l’as fait avec beaucoup de pudeur et de délicatesse. Heureuse de savoir que tu vas revenir. Je pense souvent à toi même si je m’en veux de ne pas avoir osé t’appeler, j’ai toujours peur de déranger. les anthologies éphémères (le mariage, les metiers imaginaiires) m’ont inspirée cette année pour les thèmes des ateliers d’écriture que j’anime aux Sables d’Olonne. Je te souhaite une belle fin d’été avec ta famille. Bisous et amitiés. Martine
Une brassée d’amitié pour toi ma chère Quichottine. Je t’envoie le soleil de l’île qui m’a adoptée:Djerba !