Il y a chez moi une ancienne carte postale… le détail d’une photographie d’Albert Monier, « Détresse ».
Sur mon image recadrée, il n’y a que le vieux monsieur. Tout le reste ne compte pas. Plus de monument parisien, plus de couple canotant sur la Seine. Seulement un homme, un peu trop seul, abandonné. Ses mains ne portent pas d’alliance. Il regarde le fleuve. Je me suis toujours demandé ce qu’il pensait, s’il avait encore un rêve pour le porter.
Lorsque j’ai acheté cette carte postale, j’étais encore très jeune. Mais j’ai écrit ce texte.
Je crois qu’à ce moment-là, déjà, les images me parlaient.
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Un jour tu seras vieux et, comme on va vers une étoile, tu te regarderas au miroir de ta vie. Tu t’assiéras peut-être auprès de l’eau, pour songer un instant au hasard de tes jours.
Tu ne verras plus rien de ceux qui te regardent, tu ne sentiras plus cet hiver qui te nargue. Tu seras sans bouger dans le cœur de ton ombre pour y oublier tout et y rêver en paix.
Alors, tu oublieras qu’il y a quelque part, très loin, au bout du monde, un peu de ton destin… et tu ne sauras plus ni l’heure, ni la journée, ni le soir qui bientôt viendra te réveiller.
Et, en ouvrant les yeux, parce qu’il faut bien vivre… tu penseras peut-être à celle qui s’inquiète. Tu penseras à elle et, parce que tu l’aimes, tu rentreras bien vite au nid où elle t’attend !
© Quichottine, 23 Juillet 1973.
…
una foto extraordinaria..la has muy bien sentido.. aun que optimista…ya que vuelve a su casa.. besos tilk
Me parece también…
Lorsque je l’ai retrouvée dans mes papiers, j’ai ressenti de nouveau ce besoin de lui donner un « chez lui », comme lorsque j’avais à peine plus de vingt ans. Pourtant, je sais bien que ce que photographiait Monier, c’était ce qu’aujourd’hui on appelle SDF… mais dans les années 1950, on parlait de « clochard ».
Estoy segura de que tiene alguién a quien ama… y que le esta esperando.
Tu as le don de « faire parler les images », Amielle ! Carte postale ou tableau… Plus que l’image, je suis saisie par ton texte et son développement; tu n’avais que 20 ans et déjà une telle sensibilité ! Je n’aurais vu qu’un clochard qui se réchauffe au soleil estival… Gros bisous, tout plein, Amielle.
Merci…
C’est vrai qu’il se chauffait en attendant que son linge sèche. Mais peut-être avais-je envie de le regarder autrement ?
Tu sais, il m’arrive de me demander si ce n’est pas une mauvaise chose que de vouloir tout transformer.
Ai-je déjà regardé la réalité telle qu’elle était, telle qu’elle est ?
…
Gros bisous tout plein à toi aussi, Amielle.
Bonjour, Je pense que la détresse n’est pas dans celui qu’on regarde, mais dans celui qui regarde… IL, est vieux, usé, mais sage et serein… ON a peur d’être LUI, sans même savoir ce qu’il est… J’aime beaucoup ton texte qui reflète la peur qu’ont les jeunes de vieillir… Devrais-tu l’écrire aujourd’hui que peut être tes mots seraient différents… On les retrouve dans tes réponses aux très beaux commentaires qui te sont faits (c’est un peu pour cela que le mien, qui arrive tard, sera certainement à contre courant)… Je garderais certainement le titre « Détresse » en sachant que je ne parle pas de la sienne, mais de la mienne… Bises
Tu as sans doute raison. Je crois profondément que l’on projette beaucoup de soi dans ce que l’on observe.
Si je devais l’écrire aujourd’hui, je crois que je serais lui… et que je regarderais ce fleuve en pensant au temps qui passe et en rêvant de voyages sans limite.
Je ne l’appellerais sans doute pas « Détresse », ni peut-être pas « Expérience »… aujourd’hui, ce serait « Liberté ».
… mais pourtant, je ne sais pas pourquoi, je continuerais d’imaginer qu’il a quelque part un amour qui l’attend.
Merci, Yvon… je ne voudrais pas que tu éprouves cette détresse, juste que tu imagines son rêve de voyage.
Et tu écrivais bien, avec cet élan qui avive tous les possibles. Tu l’as regardé et tu as pensé qu’il pouvait avoir quelqu’un qui l’attendait chez lui… Ce n’est pas de vieillesse dont tu parlais mais d’amour et c’est émouvant.
Je ne sais pas quoi dire…
Merci…
Bizarre quand je regarde cet homme je ne lis aucune detresse dans son visage. tout au plus est il intrigué par quelque chose 😉 Etonnant comme une image nous fais ressentir des choses différentes suivant qui on est . Tes mots sont très doux, j’aime beaucoup ce texte aussi . Je t’avoue que je ne suis pas pressée d’être vieille. plus que la mort cet état de chose me fait très peur ^^
La détresse je crois était plus dans son environnement.
Tu vois, lorsqu’on regarde en grand l’image, on voit qu’il est assis à côté d’un vêtement qui sèche sur le parapet, que ceux qu’il portent sont usés et sales… Je me demande si le photographe n’a pas donné ce titre pour exprimer ce qu’il avait ressenti d’abandon. Abandon de son image, de celle qu’il donne à ceux qui l’entourent.
Je ne sais pas ce que l’on pouvait penser ou dire dans les années cinquante… Après la guerre, au moment où il fallait revivre. Ce vieil homme, qu’avait-il vu, qu’avait-il vécu ? Pourquoi avait-il abandonné ?
Je ne sais pas. Et, pourtant, en le regardant, je l’imaginais plus rêvant à un ailleurs où il pourrait être heureux.
Tu as encore le temps d’être jeune, profites-en. On peut rester jeune très longtemps…
Mais n’aie pas peur non plus de vieillir, l’âge a apporte d’autres joies.
J’aime bien être grand-mère !
Gros bisous, Loralie.
Pour ma part, je crois qu’il attend quelque chose… Il semble usé, fatigué…
Usé et fatigué par la vie, certainement.
Je crois que je l’aurais appelé « expérience » plutôt que « détresse »…
Merci, Petite Elfe !
Je crois avoir un peu de ce vieil homme en moi . Ce qu il pense … ce que je pense … Je continue a te lire avec beaucoup d attention . Je t embrasse .
Je crois que nous en avons tous un peu… lorsque nous nous penchons sur notre passé.
Merci d’être toujours là, Vaga !
Un mot, sans lire les autres commentaires…. « Je suis là, si seul, je parais désemparé, avec mon mégot éteint à la bouche, mais… que croyez vous? Il reste derrière mes yeux fermés, tout l’éclat du soleil, tous les sourires rencontrés, tous mes amours, oui mes amours, vivant chacun dans mon cœur qui se complètent et m’aident dans mon sommeil, il y a cette chaleur qui s’irradie et m’aide à supporter le froid de la demi-saison… et..il y a Vous, chacun qui me croisez, et qui m’imagine au bout du rouleau, passez votre chemin… et laissez moi rêver… » Et Quichottine: « Je crois qu’à ce moment-là, déjà, les images me parlaient »… Quand les images nous parlent, elles nous parlent depuis toujours, pour nous parler…jusqu’au bout, ce’st en nous… Bisous
Sourire…
J’aime beaucoup lorsque les images te parlent…
Merci, Mahina.
Je te réponds tardivement, j’ai eu trop à faire, et j’ai dû m’absenter de notre blogosphère.
… alors, merci pour ta présence.
Tu as bien fait de ne pas lire les autres commentaires. Tes mots auraient peut-être été différents.
Je t’embrasse fort