Annie David, Pure fiction

Il n’y avait pas que des recueils de poèmes, dans ma liste d’envies…

 

Ce roman-là, je l’ai acheté sans grande conviction, juste « pour voir », comme il m’arrive d’acheter un best-seller…

 

– Tu exagères ! Pourquoi n’achèterais-tu pas ces livres qui se vendent comme des petits pains, qui sont tellement présents partout que c’en est écœurant ?

 

Eh bien, justement… parce qu’ils sont « partout », sur les présentoirs des supermarchés, dans les vitrines des meilleures librairies, sur les pages des magazines, dans les encarts littéraires de nos quotidiens, et même dans les journaux que l’on distribue gratuitement dans les transports en commun…

 

– Tu fais de la ségrégation ?

 

Un peu… mais pas tout le temps. Preuves en sont certains des livres présents sur mes étagères, ici. Ils sont ou ont été sur le devant de la scène, ont eu leur jours de gloire.

 

Cependant…

 

– Cependant ?

 

Ils n’ont pas vraiment besoin d’une page de plus de publicité. Un lecteur de plus ou de moins ne fait pas vraiment de différence quand on en a déjà des milliers…

 

Alors, c’est vrai… J’aime aussi prendre un livre un peu jauni, défraîchi… désespéré…

 

– Un livre désespéré… ça, je n’ai jamais vu !

 

C’est parce que tu n’as jamais bien regardé… Parce que tu n’as pas vu les livres qui frémissaient d’aise quand tu les effleurais.

 

– Admettons ! Et alors, ce roman ?

 

Quel roman ?

 

– Celui que tu t’es fait livrer, qui n’est pas un recueil de poèmes…

 

Ah oui ! J’allais oublier. Je pensais à autre chose.

 

– À quoi ?

 

À la marge infime qui sépare parfois la fiction de la réalité.

 

– Tu peux préciser ?

 

Oui.. Lorsque j’écris un roman, je dois d’abord répondre aux sempiternelles questions qui guideront mon écriture.

 

– Mais encore ?

 

L’action n’est pas suffisante, il faut un lieu, un temps, une cause, des conséquences, et, ensuite, les personnages pourront enfin vivre vraiment.

 

– Je veux bien. Tu as posé le « Qui », le « Quoi », le « Quand », le « Où », le « Comment », le « Pourquoi » aussi… tu pourrais te demander le « Pour qui » ?

 

Pas seulement, mais c’est un bon début.

 

– Et ensuite… tu dois décider si tu veux que le lecteur te croie ou non.

 

Un peu, mais pas tout à fait. Tu peux décider qu’il devra se demander sans arrêt si tu as mis en scène des personnages et des situations réelles… s’il s’agit d’une auto-fiction…

 

– Je ne vois pas où tu vas, là…

 

C’est normal. Tu n’as pas lu le roman d’Annie David. Moi, si.

 

Je l’ai lu… d’abord un peu critique…

 

– Pourquoi ?

 

Pour des bêtises ! Mais j’ai bien vite oublié… Je suis entrée dans l’histoire, et je me suis régalée !

 

– Ah bon ? Tu peux nous en dire davantage ?

 

Écoute… cette « Pure fiction » peut se lire de plusieurs façons. C’est un divertissement, ou si l’on préfère, une critique de notre monde. Une mise au point.

 

– Tu peux nous donner des exemples, nous parler de l’intrigue, des personnages, du décor…?

 

Je vais prendre le risque… puisqu’il n’y a pas d’extrait sur le site de TheBookEdition.

 

« Chacun sait que nos élus sont des gens lisses et souriants à qui rien n’arrive en dehors de quelques vociférations de circonstances en tribune lorsque la politique l’exige. On les devine familiers entre eux en privé, membres cooptés des clubs sélects et solides comme des rocs. Pour qui l’aurait oublié, toutefois, les élus sont des hommes et, parfois, des femmes comme nous. Ils ont des rêves, ils pètent les plombs, ils pleurent, ils se trompent, ils se rachètent ou ils fuient.

Il arrive aussi que des jeunes, sur la route, leur en apprennent un peu sur la vraie vie, les aident à réfléchir. Il arrive que les élus tombent amoureux et ne se relèvent pas. Il arrive qu’un département entier se grille les ailes aux projecteurs. Tenez, la Sonsonnette supérieure, par exemple, qui ronronnait de contentement au soleil, se laissant envahir pacifiquement par les Anglais. Voilà un département que la fièvre de l’image rendit maboul, et je m’en vais maintenant vous en conter l’histoire, puisque je vois que la télé a rendu votre cerveau disponible… »

(p.1)

 

– C’est quoi, la « Sonsonnette Supérieure » ?

 

Eh bien… C’est le département où se trouve « Sainte Julie », un petit bourg situé non loin de la « grande » ville de « Malvoisins ».

 

– Je ne l’ai pas trouvé sur la carte de France !

 

Dans le Sud-Ouest…

 

– Il n’y est pas ! Pas plus que ta ville ou ton bourg !

 

C’est normal…

 

– Normal ? Mais tu te moques de moi !

 

Mais non…! Tu sais bien qu’il s’agit d’une « pure fiction ». Donc, forcément, les noms sont modifiés, tout en gardant suffisamment de vraisemblance pour qu’on essaie de retrouver l’original.

 

D’ailleurs, j’ai ri en lisant une note de bas de page… la seule et unique du livre.

 

« C’est en 1968 que la Sonsonnette Inférieure décida de devenir Sonsonnette Maritime, tandis que la Sonsonnette Supérieure préféra le rester. Normal, elle n’avait pas la mer. »

(p.5)

 

La Charente et la Sonsonnette ont de nombreux points communs, mais qu’importe ? Oublions, voulez-vous ?

 

 

« C’est un trou de verdure où coule une rivière« … J’ai ce vers de Rimbaud en tête depuis que j’ai refermé mon livre. Un décor de « pure fiction », mais où la réalité déroule patiemment les travers de notre monde à nous.

 

Je n’en dirai rien de plus. J’ai aimé.

 

130311_Annie_David.jpg (Clic pour retrouver le roman chez TheBookEdition)

 

 

N.B. Bien que ce ne soit pas dans cette édition, les premières pages du roman sont consultables sur Google Livres (clic)

 

 

Le blog d’Annie David semble en construction (ancien blog ici).

 

Spécialiste de l’auto-édition, chroniqueuse littéraire, Annie David était l’une des animatrices du blog de TBE.

Paru en 2006, d’abord chez Lulu.com Pure Fiction est son premier roman.