Bruno Robert, D’un instant à l’autre

C’est le dernier…

 

– Ah bon ? Je croyais que tu allais nous faire une semaine à rallonge et qui aurait quatre jeudis…

 

Mais non, voyons !

 

– Une semaine, ça n’a que sept jours ! Et tu nous as déjà proposé huit pages dans ta « semaine poésie » !

 

(Le lutin bleu était fâché… il avait l’impression étrange que la bibliothécaire ne voulait plus de lui sur ses pages.)

 

Je sais compter aussi.

 

(Quichottine le regarda attentivement et sourit, ayant trouvé la parade.)

 

En fait, il y aura neuf pages, c’est vrai, mais seulement sept parmi les auto-édités.

 

– Oui… mais ce n’est pas bien pour les autres.

 

Quels autres ?

 

– Ceux que tu n’as pas encore lus, ceux qui passent en espérant que tu veuilles bien les mettre dans ta vitrine magique, parce qu’ils sont sûrs que tu aimerais ce qu’ils écrivent puisque tu aimes aller chez eux.

 

C’est vrai… mais là, j’ai seulement fait un peu de place pour eux sur mes étagères… Il faut du temps et un certain budget pour en ajouter d’autres. Tu es bien d’accord ?

 

– Bien sûr !

 

(« Ouf ! », se dit le Lutin bleu, je vais avoir l’occasion de reprendre ma place dans la bibliothèque. Après tout, J’aurais aussi pu écrire des livres si j’avais voulu.)

 

Je crois que nous avons fait assez de place.

 

(Quichottine scrutait sur le visage de son ami l’évolution de ses pensées. Elle retint difficilement un sourire qu’il aurait certainement très mal pris.)

 

Dans la bibliothèque, les visiteurs parcouraient les allées, indifférents au dialogue qui se déroulait à mi-voix près de la fenêtre.

 

– Je pourrai encore raconter des histoires ?

 

(Le rire de Quichottine fusa, léger comme le son du triangle après l’intervention de la grosse caisse.)

 

Je t’attendais ! Avoues que tu es jaloux !

 

– Moi ? Mais pas du tout…

 

(Si vous n’aviez jamais vu Le Lutin bleu rougir jusqu’au bout de ses oreilles, c’était le moment de regarder ce qui se passait près du bureau de la bibliothécaire.)

 

Il est jaloux ! Il est jaloux !

 

– Mais…

 

Quichottine arrêta soudain de plaisanter. Des larmes perlaient dans les yeux de son ami et elles n’avaient rien de virtuel.

 

Elle le prit entre ses mains et le serra tout contre elle, dans la chaleur de son cou, tout près de là où le sang battait au rythme de son cœur.

 

Écoute… Tu sais bien que je t’aime et que jamais je ne t’empêcherai de raconter…

 

– Aimer… aimer… mais quand on aime, on ne se moque pas !

 

Tu as raison, j’ai eu tort de plaisanter.

 

Je peux te lire un petit bout de ce dernier livre ?

 

– Alors, juste un petit extrait… voyons… Comment l’écrivait-il déjà sur son blog ?

 

Il disait toujours :

 

 

Comme un murmure au creux de l’oreille,

en trois petits vers, quelques mots à déguster

au gré des sens, sentiments,

sensations, simplement

juste le temps d’un instant

 

Brunô sur ses pages « Photo-Haïku »

L’Encre des mots, 2009

 

– J’aimais bien ces « trois petits vers ».

 

Quelques mots qui se posent comme le ferait une grande page, mais avec plus de silence, plus de possibilités d’imaginer tout ce qui n’est pas dit. Des haïkus sur chaque page, c’est ce qu’on trouve dans le recueil de Brunô.

 

– « Des » ?

 

Oui, trois petits haïkus par page, de la page 9 à la page 117, groupés selon le thème qu’ils évoquent.

 

– Alors, on fait comment pour les lire ?

 

Comme on veut. On peut en lire seulement un, et se laisser porter, ou lire toute la page comme un plus long poème qui aurait plusieurs strophes.

 

– Et toi, tu préfères quoi ?

 

Ouvrir le livre au hasard, et laisser mes yeux se poser sur celui qui avait rendez-vous avec moi, juste à ce moment-là.

 

– Tu as fait comme ça, aujourd’hui ?

 

Oui… pour une fois, je ne l’ai pas choisi. Sinon, je vous aurais dévoilé ceux des deux dernières pages… « Perles de vie ». Je préfère vous les laisser découvrir.

 

Celui que je vous montre aujourd’hui, je l’ai pris en haut de la page 82… dans « Manteau de nuit »

 

 

Bruissement d’ailes

Douce caresse d’amour

Un ange passe

 

Bruno Robert, D’un instant à l’autre, p.82

 

L’ange est passé, l’as-tu senti ?

 

 

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Bruno Robert

D’un instant à l’autre

 

TheBookEdition, coll. « Arabesque », 2011

ISBN : 979-10-90307-00-1

 

 

 

 

 

 

Il y aura d’autres livres, bien sûr. Plus tard.

 

Comme je suis sûre que chacun des auteurs présentés cette semaine en Quichottinie y trouvera l’occasion d’y mettre d’autres mots.

 

60 commentaires à propos de “Bruno Robert, D’un instant à l’autre”

  1. Je viens de trouver une plume, légère comme un duvet, plume d’ange à n’en pas douter, juste là, dans un rayon de lune…

  2. De très jolis vers de Bruno même si je n’aime pas trop les Haïkus qui me laissent un goût de trop comme les finger de Monsieur Cadburry, tu ne pourrais pas les faire un peu plus long, dis….

    Bises Quichottine

    • C’est ce qui m’arrive avec certaines lectures… que je voudrais ne pas voir se terminer.

       

      Mais un haïku doit se suffire à lui seul, je crois.

      Merci pour ce partage, Martine. Bises et douce soirée.

  3. Sourires.. quel curieux ce lutin … Il a eu le dernier mot…..

     

    Belle journée chez toi. Bises de nous deux

    • Il a toujours le dernier mot…

      Merci, Patriarch. J’espère que tu auras passé une belle journée toi aussi.

      Bises affectueuses à vous deux.

  4. Je crois que lorsqu’on lit un haïku, il faut n’en lire qu’un à la fois et lui laisser prendre sa place

  5. Merci encore ma Quichottine, tu es une personne merveilleuse, tu nous fais découvrir des choses superbes

    Amitiés, Flo

    • Je ne fais que parler de ce que j’aime… comme vous tous.

       

      Merci à toi, Flo. Passe une douce soirée. Bisous.

  6. Je  connais Notre  Brunô qui aime tant les mots  qu’il les croque à pleines  dents!

    Il écrit de belles choses très sensibles .Le petit lutin aura bien l’occasion de nous raconter encore de belels histoires j’en suis certaine; d’ailleurs pourquoi, ne publierait-il pas lui aussi ?

     je t’embrasse

     

     

    • Tu as raison… L’amiral des Croqueurs de mots était à découvrir sur ses propres pages.

       

      Le Lutin bleu ? Je ne sais. Il le fera peut-être un jour.

      Je t’embrasse. Passe une douce soirée.

  7. J’aime beaucoup  » comme un murmure au creux de l’oreille .. » , quelques mots d’une douce vérité.Belle soirée, bisous Quichottine

    • J’avais aussi beaucoup aimé cette formulation.

      Merci pour ces mots, Andrée.

      Passe une douce soirée. Bisous pour toi.

  8. je passe en trois petits mots du soir avant couvre feu … Brunô a fait un joli reccueil, « à croquer « si j’ose dire comme une gourmandise, on pioche suivant son envie du moment !!! merci pour ton bel hommage à notre Amiral !! .. gros bizzzoux Quichottine (complètement absente Tricotine aujourd’hui et demain je crois bien aussi )

    • Tu as beaucoup à faire… et ta présence me touche beaucoup.

       

      Le recueil de Brunô est très beau.

       

      Je t’embrasse. Passe une belle soirée.

  9. Bravo à Bruno pour ses jolis mots et merci à toi de nous els faire découvrir. Un lutin mauve ça doit être joli aussi. Bisous

    • Les lutins sont jolis, quelle qu’en soit la couleur, quand ils s’amusent sur nos pages.

      Bisous et douce soirée à toi.

  10. bonsoir ma chère Quichottine
    le haïku est un art difficile
    hors de nos habitudes
    j’admire ceux qui comme Bruno y excellent
    je m’y suis essayé plusieurs fois mais je n’en ai jamais été satisfait
    il faudra que je m’y remette
    bonne soirée
    gros bisous d’amitié

     

    • Je ne sais pas les écrire… alors, je lis ceux qui s’y attèlent.

      Douce soirée à toi aussi. Merci.

    • Alors, j’espère que ta journée très importante se sera bien passée.

      Bisous et douce soirée, Dom.

  11. L’ange est passé, petite trace infime il a laissé,

    j’ai aimé

    gros bisous Quichottine

  12. Bonjour Quichottine , j’ignorais qu’il en avait fait un livre , c’est un Monsieur que j’apprecie beaucoup

    Bises et bonne journée

    • Il n’y a pas longtemps qu’il est sorti…

      J’apprécie aussi.

       

      Bises et douce soirée, Canelle. Merci !

  13. J’aime bien les trois vers tous simples de Bruno Robert. Là n’est pas la question … mais je suis un peu surprise que dès que quelqu’un écrit un texte  de 3 vers il est baptisé « haïku » …

    Le haïku répond à des règles très précises (et c’est là toute la difficulté) Il faut que chaque vers corresponde à un nombre précis de pieds : 5/7/5 … même si les hïkus modernes autorisent davantage de liberté mais aucun vers ne peut excéder 12 pieds

    Ensuite un haïku doit ocntenir un mot et une référence à la nature et aux saisons (kigo)

    Donc, il faudrait songer à trouver d’autres mots pour nommer ces poésies courtes qui sont très à la mode . Un nom correspondant à notre culture

    • J’ai découvert les haïkus en me promenant sur la Toile. Je suis d’accord avec toi, la définition première a été contournée.

       

      Je ne sais pas en écrire. Je connaissais quelqu’un qui le savait et m’en avait expliqué les rudiments. Mais je n’y suis pas à l’aise.

       

      Je me dis que ces courts poèmes sont nos « haïkus » à nous, même s’il serait préférable de parler de tercets libres.

       

      Nous plairaient-ils moins si nous les nommions autrement ?

      Je ne sais.

       

      En tout cas, merci pour ce partage, Liza.

  14. Ils sont très beaux les mots de Brunô, ils permettent de partir en voyage chacun à sa façon, à son rythme vers une destination secrète, celle qui convient le mieux à l’instant où on les lit.

    Je suis heureuse de savoir que tu as réussi à soulager de sa peine, le petit lutin bleu, tu l’as apaisé par le battement de ton coeur, comme une maman le ferait pour son enfant chagriné, comme un amant le ferait pour calmer les larmes de celle qu’il aime.

    Merci douce Quichottine pour cette page supplémentaire de poésie et de tendresse.

    Je t’embrasse fort

    Claire

    • Merci pour ces mots qui expriment à merveille ce que je ressens.

      Trois vers pour un voyage qui peut être au long cours dans le pays des rêves.

       

      Il ne faut jamais laisser ceux que l’on aime avoir du chagrin.

      Merci à toi, pour tout…

  15. Bonjour Quichotine,

    Merci pour cet éclairage, un honneur de figurer dans ta bibliothèque. Je me fais rare en ce moment, quelques soucis de santé qui tardent à se régler, aujourd’hui IRM cérébrale pour voir si quelques haïku ne le perturbent pas. D’autres problèmes plus matériels à régler également. Ne m’en veux pas trop de mon silence mais je suis assez raplapla en ce moment.

    A+ Quichottine et encore merci de ton amitié

    Bises

    Brunô

    • Pourquoi t’en voudrais-je, Brunô ?

      Chacun fait ce qu’il peut et tu as toutes les excuses du monde s’il t’en fallait ici.

      J’espère que tu vas te remettre et que tu retrouveras du temps pour écrire.

       

      Bisous et douce soirée, Brunô. Merci d’être passé malgré tout. Cela m’a fait plaisir.

      Prends bien soin de toi.

  16. coucou, je lis , je relis, et, je reste bouche bée, superbe, Bises MIAOU!!!!!!!!!!!!!!

  17. J’aime beaucoup les haïkus : l’art de décrire tout un tableau en quelques pieds !

    • Certains y excellent… Personnellement, je ne sais pas en écrire.

       

      (Je dois être trop bavarde, moi… )

      Merci pour tes mots, Kri.

      Passe une douce soirée.

  18. J’ai beau relire, je n’accroche pas.

    Cela ne me parle pas, mais je ne nie pas la beauté du texte.

    Mais bravo quand même  Brunô 🙂

    Bisous ma Quich’ et bonne soirée 🙂

    • C’est le propre de la poésie… Il y a les poèmes qui attirent et ceux qui nous laissent froids. Nul n’y peut rien.

      Merci pour ces mots en partage et ta sincérité, ma Clo.

      Je t’embrasse très fort. Passe une belle soirée.

  19. Tu as trouvé le mot juste : « tercet » .

    Je comprends que tu sois mal à l’aise avec cette forme, car les règles qui permettent de faire des haïkus sont issues d’une culture très complexe et qui ne s’aborde pas comme ça …Ceci étant ce peut être une excellent exercice de style à défaut de créer des haïkus dignes des grands maîtres Japonais .

     

    • Merci, Liza.

      Je suis très ignorante quant à la culture japonaise et asiatique en général.

      Il me faudra la découvrir.

  20. Pas aisé cet art du Haiku et Bruno Robert parait exceller dans cette discipline. Merci de ce partage que j’ai beaucoup aimé. Bises et bonne journée

  21. Ah oui Brunô plus besoin de le présenter sauf aux nouveaux bien évidemment.

    Des écrits toujours subtils.

    J’aimerais pouvoir faire cela.

    Je suis toujours sous le charme quand je lis de tels écrits.

    Bisous

    christelle

  22. ah! celui-ci, je l’ai!

    moi, je lis les pages séquentiellement, par thème…

    Bises et merci