De l’importance d’un titre

Nous avons  abandonné notre héros dans le lit de Maritorne

Ah !… Je vois que quelques-uns, parmi vous, ont suivi…

Le chevalier n’est pas dans le lit de Maritorne, il est dans celui que lui a préparé cette servante avant de risquer d’y laisser sa vertu

Vous suivez toujours?…

D’accord, elle n’a pas de vertu.

Mais il n’empêche qu’elle n’avait nulle envie de partager la couche du chevalier. Elle se défend. Son amant (celui qu’elle allait rejoindre pour de vrai… amant ou pas, le résultat devait être le même) tabasse don Quichotte et le laisse pour mort tandis que Sancho en profite pour lutiner la belle…

(Heureusement que, dans le noir, tous les chats sont gris…
parce qu’il faut dire que Maritorne est loin d’être jolie !)

Un archer de la Santa Hermandad s’en mêle et va enquêter sur ce qu’il croit être un crime…

Le chapitre seize s’achève sur ce représentant de la force publique qui fouille la maison à la recherche d’une lampe.

(Il faut dire que l’aubergiste a éteint la lumière…
et croyez-moi, à l’époque,
il ne suffisait pas d’appuyer sur un bouton
pour rallumer une lampe !)

L’archer, lâchant enfin la barbe de don Quichotte, sortit pour aller chercher de la lumière et revenir arrêter les coupables ; mais il n’en trouva pas une étincelle, l’hôtelier ayant exprès éteint la lampe du portail en se retirant. L’archer fut donc obligé de recourir à la cheminée, où ce ne fut qu’à force de patience et de temps perdu qu’il trouva moyen de rallumer une autre mèche.

(Don Quichotte, I, 16)

Voilà, c’est là que nous avions laissé notre lecture…

Le chapitre suivant, comme tous ceux qui le précèdent et ceux qui le suivront, a un titre. Je crois qu’il faut s’y arrêter un peu.

Où se poursuit l’histoire des innombrables travaux qu’eut à supporter le brave don Quichotte avec son bon écuyer Sancho Panza, dans l’hôtellerie qu’il avait crue, pour son malheur, être un château

Rien de bien important ? Mais si… parce qu’il faut le mettre en regard du titre du chapitre seize :

De ce qui arriva à l’ingénieux hidalgo dans l’hôtellerie qu’il prenait pour un château

Vous voyez où je veux en venir ? Un peu de comparaison… pour voir comment Cervantès va amener son lecteur à attendre des événements malheureux (pour le héros bien sûr).

Ces deux titres montrent l’art de l’écrivain.

Vous savez ? C’est comme lorsque dans un film, par exemple, vous vous promenez avec le héros, vous rêvez d’être à ses côtés… Tout est beau, presque parfait… trop parfait. Il y a quelque chose qui attire votre attention, un détail, quelques notes de musique, une porte qui grince, une lueur là où il ne devrait pas y en avoir… Vous vous mettez à avoir peur

Eh bien ! Là, c’est pareil… parce que, de la simple hôtellerie qu’il prenait pour un château et de ce qu’il pouvait arriver au héros, nous passons à quelque chose de beaucoup plus précis, sans l’être toutefois…

Le titre ne nous dit rien de plus quant aux « travaux » si ce n’est qu’ils sont « innombrables » (on croirait entendre l’Aède nous raconter les aventures d‘Hercule… euh d’Héraclès, puisque nous serions alors en Grèce !). Par contre, dans son malheur (parce que malheur il y a… vous voyez bien, c’est le détail important que révèle le titre !), don Quichotte n’est plus seul désormais.  Il est avec son « bon écuyer« , Sancho Panza.

Vous croyez que ça va l’aider ? Je me suis arrêtée au titre… et je vais vous laisser imaginer la suite…

(En attendant de vous donner, jeudi,
celle que Cervantès a écrite,
il y a quatre cents ans !)

34 commentaires à propos de “De l’importance d’un titre”

  1. Petit coucou tout simplement avant de me plonger dans le titre de ton article lol…
    Bises et bonne semaine,

    Syl

  2. Bonjour Quichottine,
    Moi qui n’ai jamais lu Cervantès, je vais en apprendre…
    Syl.

    • Ah… si tu n’as jamais lu, il faudra que je fasse un petit résumé… des chapitres précédents.. pour la prochaine fois !

  3. « L’archer lâchant la barbe de Don Quichote.. ».mais que faisait-il avec la barbe de Don Quichotte en main ?…va falloir que je prenne  plus de temps moi..je trouve des choses curieuses..;dans ce texte…C’est vrai que je suis encore dans un esprit d’amusement il faudra que je vois ça plus sérieusement….

    • Ah… tu as raison, c’est moi qui aurais dû reprendre la citation un peu plus haut… En fait, l’archer, qui est dans le noir de la chambre parce que l’hôtelier s’est dépêché d’éteindre en l’entendant arriver, a pris ce qu’il avait sous la main, au plus près.. c’était la barbe de don Quichotte… et, comme ce dernier ne réagissait pas, l’archer a cru qu’il était mort !

      Voilà… Mais je reprendrai en détail la prochaine fois…

  4. coucou chez toi aussi je suis passée chez Siratus la reine des coquillages et Noel pour eux les coquillages c’est pas la fête du tout

    allez ciao

     

    • Merci d’avoir prolongé ta visite, Dgidgi !… J’essaie, dans la mesure du possible, d’éviter l’ennui… et je suis contente quand ça marche !

      passe une belle soirée…

  5. Que font ces héros dans la pénombre, n’y a-t-il point de bougie dans cette auberge? Mais je demande comment le pauvre Sancho va réagir en voyant le visage de celle qu’il vient de lutiner. Aura-t-til besoin de consulter son psy de toute urgence?
    Quel insoutenable suspens…
    Santounette

    • Tu as raison, je me suis posée la question… en fait, Cervantès et son traducteur ne parlent que d’une lampe.

      Je ris en pensant à Sanco consultant son psy… c’est une possibilité à creuser… merci !

      Merci d’avoir prolongé ta visite… Passe une belle soirée

  6. Bonjour Quichottine, notre hidalgo n’est plus seul en effet mais il faut dire que cette nouvelle déconvenue, bien loin des codes et coutumes de la chevallerie errante, est de taille …
    Mais Rossinante que devient-elle ?
    Et surtout, quelqu’un peut-il rallumer la lumière ?
    Il fait si noir !
    Bises,

    • J’espère que la lumière sera très vite rallumée !

      Pour Rossinante, je suppose qu’il est bien à l’abri dans l’écurie, savourant un peu d’avoine et rêvant à quelque jument rencontrée dans les herbages…

      Mais tu as raison, il ne faut pas attendre trop longtemps pour raconter la suite de l’histoire !

      Je t’embrasse, Muad

  7. OK…..ok !!!!!……mais ça va s’arranger !
    T’as du boulot sur un autre blog !….désolée, mais, les amies, c’est comme ça!
    Je compte sur toi !               

    • Je t’ai donnée ma journée, Chris… c’est mon cadeau de Noël pour toi…

      Les amies, c’est ça aussi ! (RIRES !!!)

      Bisous et très bon retour chez toi

  8. Bonjour ma chère Quichottine, si seulement j’avais encore le livre de Cervantès tu penses que j’aurais regarder derechef.. mais je ne me souviens plus et voilà que le suspens commence.. tu es bien cruelle par ce glacial matin car malgré le fourneau mes doigts sont tout gelé sur le clavier… j’ai aimé te lire et je repars toute ragaillardie..

    plein de bisous et une très blele journée

    chantal

    • Ne t’inquète pas, sauf ennui majeur, tu n’auras pas beaucoup à attendre pour avoir la suite de l’histoire…

      C’est vrai que ce n’est pas facile en ce moment avec le froid… les claviers sont tout gelés !!!

      Merci d’avoir pris le temps d’une visite ! Belle journée à toi aussi !

  9. J’ai fait ma livraison pour le goûter de Chris.
    Bises
    Roland

  10. Je m’en vais de ce pas lire l’article d’aujourd’hui. Ah, je préfère cela, être à jour ! Ce n’est pas si souvent. Lol

  11. Ce qui est intéresant dans cette pratique du titre est qu’elle est présente dans des tas de romans où les épisodes se succèdent.

    J’y vois plusieurs choses :
    1. Mettre en attente le lecteur qui vient de finir un chapitre et qui apprend (grosso-modo) ce qu’il découvrira quand il reprendra sa lecture
    2. Informer sur le contenu du chapitre en question
    3. Créer une surprise par la non adéquation du titre et la teneur du chapitre
    4. Même chose mais avec une teneur en adéquation mais qui ne correspond pas véritablement à ce que le lecteur a pu imaginer.

    Toi tu pratiques non pas le titre accrocheur mais l’article complet qui met le lecteur en attente.
    Décidemment, tu me fais rire. J’apprends beaucoup à ta lecture commentée de ce roman.

    • Tu vois, Roland, j’ai entrepris cette nouvelle lecture en me disant que si je pouvais faire partager non pas tout le roman mais ces petites choses qui me paraissent maintenant évidentes mais que je n’avais pas vues lors de mes premières lectures, ça donnerait peut-être à d’autres l’envie de le lire.

      Je suis contente que ma lecture te plaise…